L'étiquette de bière parfaite
Auteur : Emmanuel Gillard - Publié le 19 janvier 2016 et remis à jour le 16 août 2017 pour tenir compte du décret n° 2016-1531 du 15 novembre 2016 relatif à la composition et à l'étiquetage des produits brassicoles

Comment aider le consommateur face à cette multitude de flaveurs?
Comment aider le brasseur à mieux mettre en avant ses produits?

Je pars en effet du principe que le choix d'un consommateur dans un rayon de bières n'est pas aisé. Il se retrouve face à une quantité de marques sans avoir beaucoup d'informations pour l'aider. De ce fait, il est souvent tenté de reprendre un produit qu'il connaît déjà.

Aussi, j'ai rédigé un cahier des charges reprenant ce que je considère comme les différents éléments d'une étiquette parfaite.
Une telle étiquette devrait ainsi tenir compte de quatre séries de critères :

1. Mentions indispensables

o le nom (ou la raison sociale) et l'adresse du fabricant (lieu de production de la bière)
o si la bière est brassée pour un tiers, le nom et l'adresse du distributeur (bière brassée par X au nom de Y)
o s'il s'agit d'une bière d'étiquettes (produit commercialisé sous des dénominations différentes), le nom de la bière originale
o date d'embouteillage (éventuellement sous la forme "Embouteillée x mois avant la date limite indiquée")

2. Mentions conseillées

o liste détaillée des ingrédients : variétés des céréales maltées et non maltées, liste des houblons (cônes, pellets, extraits), type de levure, autres ajouts (sucre, additifs, fruits, jus de fruits, arômes naturels de fruits, herbes, épices,…)
o le style de bière
o couleur (EBC)
o amertume (EBU)
o densité finale (Plato)
o méthode de fermentation (haute, basse, spontanée, mixte)
o filtration (filtré ou non filtré)
o pasteurisation (pasteurisé ou non pasteurisé)
o refermentation éventuelle en bouteille
o indications de valeur nutritionnelle
o conseils de dégustation : type de verre, température de service, avec ou sans dépôt de levure
o méthode de conservation : bouteille couchée ou debout, température de garde, tenir à l'écart de la lumière,…
o des suggestions d'accords mets/bière
o QR code permettant l'accès direct au site internet du brasseur pour obtenir des détails supplémentaires (descriptifs des flaveurs de la bière, histoire reliée au nom de la bière ou à l’univers du produit, liste des prix remportés,…)

3. Les mentions légales imposées par la loi

En voici le détail pour la France, la plupart de ces éléments s'appuyant cependant sur le règlement européen N°1169/2011 concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires :

o    la dénomination commerciale

o    la dénomination légale (article 1 du décret n°92-307 du 31 mars 1992 modifié par le décret n° 2016-1531 du 15 novembre 2016 relatif à la composition et à l'étiquetage des produits brassicoles) : bière, bière de fermentation lactique, bière sans alcool, bière à …, bière aromatisée à … ou panaché

o    le nom ou la raison sociale de l'exploitant (article 8 point 1 du règlement UE N°1169/2011). De ce fait, la loi n'oblige pas d'indiquer le nom du producteur dans le cas du brassage à façon

o    le pays d’origine ou le lieu de provenance, dans les cas où son omission serait susceptible d’induire en erreur les consommateurs sur le pays d’origine ou le lieu de provenance réel de la bière. Cette exigence s’applique en particulier si les informations jointes à la bière ou l’étiquette dans son ensemble peuvent laisser penser que la denrée a un pays d’origine ou un lieu de provenance différent (article 26 du règlement UE N°1169/2011).

o    la liste des ingrédients ou une déclaration nutritionnelle ne sont pas obligatoires pour les boissons titrant plus de 1,2 % d’alcool en volume (article 16 point 4 du règlement UE N°1169/2011). Cependant, l'ajout d'herbes aromatiques ou d'épices naturelles nécessite que les ingrédients ajoutés soient mentionnés dans l'étiquetage du produit (article 1 alinéa 1 du décret n°92-307 du 31 mars 1992 modifié par le décret n° 2016-1531 du 15 novembre 2016 relatif à la composition et à l'étiquetage des produits brassicoles) : "Des herbes aromatiques ou des épices naturelles peuvent être ajoutées à la bière si l’adjonction de ces ingrédients ne confère pas au produit final de manière perceptible les caractéristiques aromatiques typiques de ces ingrédients. Les ingrédients ajoutés sont mentionnés dans l’étiquetage du produit"

o    la liste des allergènes (article 21 du règlement UE N°1169/2011 et son annexe II listant l'ensemble des allergènes). Pour la bière, il convient de mentionner la présence éventuelle de gluten (ce qui est le cas pour les bières contenant du malt d'orge) et de sulfites (si la concentration est supérieure à 10mg/l)

o    le titre alcoométrique volumique acquis pour les boissons titrant plus de 1,2 % d'alcool en volume (article 9 du règlement UE N°1169/2011). Il est à noter que l'annexe 12 de ce document autorise une tolérance de 0,5 % vol. pour les bières ayant un titre alcoométrique inférieur à 5,5 % vol. Pour les bières dont le titre alcoométrique est supérieur à 5,5 % vol., cette tolérance sera de 1% vol.

o    DLUO : Date Limite d’Utilisation Optimale exprimée de la manière suivante : « A consommer de préférence avant : xxxx » (Article R112-22 du Code de la consommation et annexe 10 du règlement UE N°1169/2011)

o    le numéro du lot de fabrication, sauf si la DLUO est indiquée, en clair et dans l'ordre, avec le jour et le mois (Article R. 112-3 du décret n° 2014-1489). La mention de l'année est également nécessaire pour les denrées dont la durabilité est supérieure à trois mois, ce qui est le cas de la bière (annexe 10 point 1c du règlement UE N°1169/2011)

o    les conditions particulières de conservation et/ou d’utilisation, le cas échéant (article 25 du règlement UE N°1169/2011)

o    le volume net (article 23 point 1a du règlement UE N°1169/2011). Le signe « e » n’est pas une mention obligatoire. Il s’agit d’une déclaration de garantie de conformité (article 8 du décret du 31 janvier 1978) en ce qui concerne la métrologie des préemballages.

o    un message de santé publique pour les boissons alcoolisées (+ de 1,2 % vol.) commercialisées en France (arrêté du 2 octobre 2006). Il s'agit d'un pictogramme représentant une femme enceinte dans un cercle barré, ou du message « La consommation de boissons alcoolisées pendant la grossesse, même en faible quantité, peut avoir des conséquences graves sur la santé de l'enfant».

4. Enfin, la mise en visibilité d'un visuel standardisé permettant aux consommateurs de distinguer les principales caractéristiques du produit : aspect, odeur, flaveurs principales,… En voici deux exemples provenant du Canada et du Royaume-Uni :

Cyclops Beer (Royaume-Uni)
Lancée en 2006, l'initiative Cyclop Beers (http://www.cyclopsbeer.co.uk) a pour objectif d'aider le consommateur dans le choix d'une bière à l'aide de descripteurs standards décrivant l'aspect, l'odeur et le goût du produit, son style ainsi que son amertume et sa sucrosité.


Le recours à des symboles plutôt qu'à des mots permet au consommateur de comprendre rapidement et facilement le type de bière proposé.
En décembre 2015, cette initiative regroupait 398 brasseries pour un total de 2358 bières différentes. Le coût d'accréditation pour une brasserie est de 300£ pour cinq bières, et de 30£ pour chaque référence supplémentaire. Chaque bière dispose d'une fiche de présentation sur le site Cyclop Beers.
Le visuel peut être utilisé sur de nombreux supports : étiquettes, verres, cavaliers de pompe, sous-bocks, flyers,…

L'Iris du goût (Canada)
L'Iris du goût (http://www.irisdugout.com) est une initiative canadienne visant à donner au consommateur une vision objective du profil gustatif d'une bière. Il ne s'agit pas d'une appréciation sur la bière mais bien de définir objectivement les principales flaveurs.
L’iris repose sur les saveurs perçues à l’aveugle, dans des verres noirs, par un comité d’analystes certifiés.
Il se matérialise par une capsule qui pourra être apposée sur la bière par le brasseur ou le revendeur.
La partie extérieure de l'iris du goût donne une indication de la couleur de la bière, sur base de cinq couleurs référentielles :


L'intérieur de l'iris du goût définit les cinq variables suivantes :

• Nez : représente les deux arômes dominants
• Sucré, amertume et acidité : représente l’intensité de chacun de ces goûts de base
• Arrière-goût : représente la durée des saveurs perceptibles après avoir avalé

L’échelle varie de 0 à 5+. L’intensité médiane égale 3.
Toutes les bières sont analysées sur une base comparative avec trois bières médianes. Pour la France, les bières retenues sont les suivantes :
• Perforth Brune pour le goût sucré
• Hoegaarden pour le goût acide
• Westmalle Triple pour le goût amer

Pour le Québec, les produits retenus sont les suivants :
• Blonde d’Achouffe pour le goût sucré
• Boréale Blanche pour le goût acide
• St-Ambroise Pale Ale pour le goût amer

Ces bières serviront de référence au panel de dégustateurs qui, par analyse consensuelle, définira l'iris du goût pour une bière déterminée. Il faut donc que ces trois bières médianes soient largement disponibles dans le commerce, ce qui explique le choix de bières pouvant être différentes pour chaque pays.